Depuis le 1er janvier 2024, un nouveau régime fiscal et social a été mis en place pour les associés des Sociétés d’Exercice Libéral (SEL).
Cette réforme s’inscrit dans une démarche de mise à jour de la doctrine fiscale et a des impacts très importants en matière d’obligations comptables et de fiscalité.
1. Qu’est-ce qu’une SEL et pourquoi ce changement ?
Les Sociétés d’Exercice Libéral (SEL) permettent aux professions libérales réglementées (comme les avocats, les médecins, les architectes, etc.) d’exercer leur activité sous forme sociétale. Ce statut offre plusieurs avantages, notamment en matière de gouvernance et de gestion des capitaux. La réforme fiscale de 2024 vise à clarifier les modalités d’imposition des rémunérations perçues par les associés exerçant au sein de ces sociétés.
L’administration fiscale, à travers un BOFiP de décembre 2023, a mis à jour une nouvelle doctrine, se conformant à la jurisprudence du Conseil d’État. Ce changement impacte la manière dont les associés sont imposés et affiliés socialement, en fonction de la nature de leur rémunération et de leur rôle au sein de la SEL.
2. Les modifications fiscales : Passage au régime BNC
Dès 2024, les rémunérations perçues par les associés d’une SEL au titre de l’exercice de leur activité libérale sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC). Cela marque un changement par rapport aux anciennes règles où les rémunérations pouvaient être imposées comme des traitements et salaires dans certains cas.
Ce changement entraîne la perte de l’abattement fiscal de 10% pour frais professionnels au niveau de l’impôt sur les revenus.
Ce nouveau régime concerne aussi bien les associés non-mandataires que les mandataires sociaux de SELARL ou SELAS, à condition qu’il n’y ait pas de lien de subordination avec la société. En l’absence de subordination, ces revenus relèvent donc des BNC, avec la possibilité de choisir le régime du micro-BNC sous certaines conditions de seuils de revenus, ou bien le régime de la déclaration contrôlée pour les recettes plus importantes.
Les mandataires sociaux (comme les gérants majoritaires de SELARL) se voient toujours imposés au titre de l’article 62 du Code Général des Impôts (CGI), pour la partie de leur rémunération correspondante aux tâches qui sont liées à la gestion plutôt qu’à l’activité libérale pure.
Pour ces derniers, il y aura donc un double régime d’imposition.
A ce jour, en l’absence de production de justificatifs prouvant la ventilation de l’activité entre la gérance et l’activité technique, la doctrine fiscale prévoit une répartition de la rémunération de 10% pour le mandat social et de 90% pour l’activité technique.
3. Rémunération et traitement social : Double affiliation
Sur le plan social, les associés mandataires sont affiliés soit au régime des indépendants (TNS), soit au régime général des salariés, en fonction de leur rôle dans la SEL. Les gérants majoritaires de SELARL, par exemple, continuent à cotiser au régime des indépendants pour l’ensemble de leurs rémunérations, y compris les dividendes excédant 10 % du capital social.
En revanche, les gérants non-majoritaires de SELARL ou les mandataires sociaux de SELAS et SELAFA sont assimilés salariés pour leur rémunération liée au mandat social, tout en étant soumis au régime TNS pour les autres revenus tirés de leur activité libérale. Ce double assujettissement peut créer une complexité administrative pour les entreprises, notamment en matière de gestion des bulletins de paie et des cotisations sociales.
4. Particularités fiscales : TVA et CFE
L’une des conséquences importantes de cette réforme est l’impact sur la TVA. Les associés des SEL, lorsqu’ils perçoivent des revenus liés à leur activité libérale, ne sont pas considérés comme assujettis à la TVA, car c’est la société qui supporte le risque économique et non l’associé en son propre nom. Par conséquent, les rémunérations techniques des associés sont exclues du champ de la TVA et ne nécessitent pas de facturation.
En ce qui concerne la Cotisation Foncière des Entreprises (CFE), les SEL demeurent assujetties à cette cotisation en tant que sociétés commerciales exerçant une activité libérale. Les associés, quant à eux, ne sont pas redevables de la CFE, sauf dans les cas où ils exerceraient une activité professionnelle propre en dehors de leur participation dans la SEL.
5. Conséquences et conseils pour une gestion optimisée
Les associés des SEL, qu’ils soient mandataires sociaux ou non, ont tout intérêt à anticiper ces changements dès 2024. Voici quelques recommandations :
- Mettre à jour la comptabilité pour intégrer les nouvelles règles de rémunération et de cotisations sociales.
- Consulter un expert-comptable pour vérifier la conformité aux nouvelles dispositions fiscales et sociales.
- Anticiper la déclaration des BNC : les associés devront déposer une déclaration spécifique (formulaire 2035) et tenir une comptabilité dédiée ou opter pour le régime micro-BNC en fonction de leurs recettes annuelles.
Cette modification est très impactante aux niveaux de l’organisation de la SEL, des obligations déclaratives des associés et de leur la fiscalité personnelle.
Nous restons votre disposition pour vous accompagner.